"Ce jour-là, justement, j’étais dans son petit appartement qui donnait sur le parc de la maison de retraite. La vue était très belle. Marie-Anne donnait des signes de fatigue et, en regardant par la fenêtre, je m’étais dit que j’aurais aimé la photographier dans ce parc, assise sur le petit banc de pierre qu’on voyait de la chambre. Cette réflexion, je me l’étais faite pendant l’été, et je me disais : “non, ayons de la patience, ce sera beaucoup mieux en novembre”. Je préférais prendre cette photo en automne, je voulais voir les feuilles mortes par terre, je savais que ma photographie serait plus symbolique. Elle dirait le retour à la terre, imminent. Alors, j’ai attendu. Et j’ai eu raison. Marie-Anne a d’ailleurs vécu encore trois ans, et nous la voyons, toute petite, sur le banc de pierre, au milieu des feuilles mortes. Cette photo, naturellement, m’est très chère, je ne peux pas en dire davantage. Marie-Anne fait partie de la nature, du feuillage, comme un petit insecte, dans l’herbe. Nous avons vécu ensemble quarante-six ans."
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