mardi 10 mai 2011

10 mai 1981

Il faisait beau le 10 mai au matin lorsque mes parents et moi étions allés voter; dans des bureaux de vote séparés car à l'époque les femmes mariées étant classées en fonction de leur nom de jeune fille. Ma mère relevait donc d'un autre bureau de vote. Cette situation correspondait parfaitement à celle qui existait au niveau familial puisque bien avant l'heure nous avions donc inventé la cohabitation avec mon père et moi qui votions d'un côté et ma mère de l'autre.
Sauf que des grains de sable peuvent se glisser quand le cercle de la famille s'élargit. Tel fût le cas le dimanche 10 mai avec l'arrivée, à l'heure du café, de deux membres de la famille par alliance dont les opinions politiques étaient diamétralement opposées à celles de mon père et aux miennes. Mais ils l'ignoraient car dans certaines familles, par prudence, on évite d'aborder certains thèmes.

De ma chambre où je m'étais prudemment repliée, j'écoutais les discussions parfaitement anodines où mes parents rivalisaient d'adresse pour éviter les sujets qui fâchent et auraient pu dériver vers des considérations politiques parfaitement de mise en ce jour du second tour des élections présidentielles.
Le temps s'écoulait sans ces invités ne songent à partir. Il devint même de plus en plus évident qu'ils souhaitaient assister avec nous à la victoire de leur candidat. Le moment venu, je m'éclipsais discrètement dans ma chambre pour écouter les résultats sur ma petite radio tandis que les adultes s'installaient eux devant le poste de télévision.

- 20h00: je fais un immense sourire. Mon père doit en faire de même dans sa tête et ma mère faire la tête. J'entends nos visiteurs qui râlent.
- 20h01: le téléphone sonne et mon père décroche car il n'y a qu'un poste fixe dans la pièce où tous sont réunis. C'est un de mes amis.
- 20h02: J'arrive en trombe. En entendant mon commentaire "Tu as vu, c'est génial! Il a réussi!" que mon père approuve d'un immense sourire tandis que ma mère s'éclipse dans la cuisine, les "invités" comprennent brutalement qu'ils se sont trompé. L'invitation à rester dîner est finalement déclinée.

à noter que le lendemain, en première page du journal "le Monde", il y aura un dessin de Konk avec des Parisiens étonnés qui découvrent que "Ben non, les chars russes ne sont pas là!"

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