vendredi 29 mai 2009

...Pause...

...décidée ce matin en rédigeant la réponse à un commentaire. Dans la lignée du billet du jour, jusque dans des détails invisibles à l'oeil nu. Pas des vacances puisque toujours présente à Nantes, avec un PC jamais bien loin. Reprise le 15 juin. Une autre date symbolique.

lire, relire et relire encore...

...et découvrir, ce qu'on n'y avait pas encore lu, ou voulu lire.
Ainsi ce livre.

La 1ère lecture, peu après sa publication, était une lecture hommage à l'actrice en robe rouge qui ensorcelait Jean Rochefort avec quelques pas de danse au dessus d'une bouche d'aération. Une lecture aussi retrouvailles avec Rouen où j'avais vécu quelques années et beaucoup aimé ce quartier de son enfance, celui de la rue "Eau de Robec" au mitant de laquelle coulait un petit ru.
Mais au delà de cette lecture j'avais découvert comment via l'écriture et le développement des photos de son père, elle avait enfin pu lever le voile noir qui recouvrait ses souvenirs, ceux d'avant la mort de ses parents alors qu'elle avait 9 ans.

Dix ans plus tard, parce qu'un enfant au lycée étudiait le style littéraire de la biographie, je l'avais relu.
Et là c'était le portrait de sa mère, esquissé de page en page qui m'avait touché. Cette mère qui se passionnait pour les tricots compliqués. "On s'abîme dans une léthargie hypnotique, renfermée sur soi dans son coin".
Comment ne pas songer à d'autres activités "hypnotiques" elles aussi, pratiquées en d'autres lieux et d'autres temps. Puzzles, broderie au point de croix, mots croisés... Que (se) cache t on derrière le morceau supplémentaire à placer, le motif à finir, la grille à achever? Ou plutôt, que fuit-on réellement?

Et puis récemment, à la recherche de cette photo qu'elle considère comme intemporelle, c'est lui, son père, qui est apparu. Et avec lui, tout un autre cortège d'interrogations autour de ce photographe/amant devenu le mari de sa mère. Qui était-il vraiment cet autre?
Et surtout, au delà de cet homme là, sait-on jamais qui est vraiment l'Autre, notamment celui dont on a eu envie un jour de partager, en pensant que ce serait pour toujours, la vie...

jeudi 28 mai 2009

... au portrait intemporel

"C'est le dernier portrait que mon père fit de moi, probablement pas très longtemps avant sa mort. Je le trouve extraordinaire. C'est ma photo. Elle résume tout ce que je suis profondément, sans défense. Ces yeux-là sont ceux que je vois dans mon miroir trente-cinq ans après quand je suis seule avec moi-même, sans masque, sans effort pour paraître.

Ainsi parfois je vois mes enfants, dans des moments de grande fatigue ou d'abandon, je vois fugitivement - si fugitivement qu'il faut vivre l'appareil photo armé en main pour capter cela! - leur visage intemporel se superposer à leur figure d'enfant. Regard, expression rassemblent en une seconde ce qu'ils sont profondément et tous les âges de leur vie. Leur visage. Et puis cela fuit. L'abandon se casse, ils régressent, ils rient, ils trichent, ils réintègrent le moment.

Mon père m'a saisie dans une de ces secondes où l'être est rassemblé. Il a fait mon portrait intemporel. Or il date d'avant leur mort, et j'étais déjà cela..."

Anny Duperey
"le voile noir"
éd° du Seuil; avril 1992

mercredi 27 mai 2009

de l'autoportrait...

ou: Un nouveau jeu chez "...un chat..." avec un "Who 's Who?"
En effet, force est de constater que, avec la multiplication des "blogs" et assimilés, est né un nouveau type d'auto-portrait: celui de "l'avatar", ce petit dessin qui accompagne le nom (ou pour les plus prudents: le pseudo) et permet d'éviter de montrer son vrai visage, même si parfois on peut l'entrevoir, plus ou moins ouvertement.

Donc à partir des "autoportraits" des commentateurs qui passent régulièrement chez "... un chat...", voici un "qui est qui" ... pour associer photo et pseudo.
Un jeu avec un absent: Malaussen: qui a un pseudo mais pas d'avatar. Et pourtant depuis le temps qu'il enseigne, il doit avoir une bonne collection de photos de classes...

Et puis il y a les autres commentateurs qui peuvent être très discrets quand leur avatar, peu bavards via leur pseudo, quant à leur visage... même si celui de l'oiseau, à l'occasion d'un anniversaire a adressé un petit clin d'oeil à ses lecteurs et lectrices lointain(e)s...

Il y a aussi les "joueurs", qui, même s'ils montrent régulièrement les photographies des leurs, esquivent ou diffèrent en ce qui les concernent et profitent du hasard de mains placées devant le visage ou d'une photo de groupe réalisée lors d'un voyage lyonnais ;-)
... D'autres encore préfèrent choisir parmi les nombreuses images et dessins auxquels ils ont accès, surtout quand l'un d'eux s'avère très ressemblant ;-)














Et puis, même si la taille des A.P.N. a beaucoup réduit, on ne vantera jamais assez les vertus d'un appareil photographique pour jouer à cache-cache.











Enfin, certains franchissent le pas et montrent davantage leur visage. Davantage? Oui si l'on considère que pour beaucoup un visage ce sont avant tout les yeux. Et le hasard a voulu que ceux qui suivent aient tous les deux des yeux très bleus. Alors parmi ces photos, en dehors de la vôtre: "qui est qui?"

réponses au petit jeu des auto-portraits

n°1, le barbu à casquette connu de tous les enfants de 7 à 77 ans: caphadock (pour en savoir plus, voir son commentaire... et son site que, honte à moi, je n'ai pas encore pris le temps d'explorer)
n°2, le petit oiseau chanteur, Gene alias Caillou Blanc (le choix de l'oiseau chanteur n'est pas surprenant pour quelqu'un qui doit avoir un gène -sans jeu de mot- migrateur vu ses fréquents déplacements entre France et Suisse quand elle ne va pas dans ses pays fétiches que sont l'Inde ou l'Afrique... mais qui aussi enseigne)
n°3, la danseuse de tango, Myosotis la Bruxelloise curieuse et "gourmande" de... plein de choses (en vrac, livres, voyages, plaisirs culinaires...)
n°4, Arlette, la Toulonaise passionnée par les arts, peinture,architecture... anciens ou contemporains... et la poésie, notamment chinoise
n°5, Marwan, le breton/normand/anglo/africain/parisien devenu récemment ligérien, passionné de photos et d'avions, et de culture SF et fantastique au sens large (Star War, Star Trek, Seigneur des anneaux...)
N°6, @nn@, le chat taquin qui, selon son humeur parfois versatile, furète de livres en images... au gré de ses "impressions"
n°7, Verveinecitron, lyonnaise, grande lectrice qui trouve le moyen malgré un emploi du temps de jeune mère de famille/superwomen de découvrir les nouveaux plaisirs du self made home (ça se dit?)
n°8, Michel, éternel voyageur entre le Sud-Est et l'Ouest, l'oeil du photographe/poète -à moins que ce ne soit l'inverse- et l'esprit toujours attentifs comme Elsa, éternelle gardienne de "l'atelier"

mardi 26 mai 2009

Jules Verne et le capitaine Némo

Il est tard (encore un endormissement devant le PC car voilà ce qui arrive quand on surfe allongée sur son lit...) donc billet a minima avec un extrait de presse qui en dit un peu plus sur l'oeuvre

A l'occasion de l'année Jules Verne, une nouvelle sculpture a été inaugurée, le samedi 3 décembre 2005, près du musée Jules Verne, dans le square longeant la rue de l'Hermitage et surplombant la Loire. L'ensemble est à l'effigie de l'écrivain enfant et du capitaine Némo. Son implantation a eu lieu en présence de l'artiste nantaise, Elisabeth Cibot.

Si vous venez sur Nantes, il faut donc oser monter sur la butte Ste Anne et à mi hauteur de la rue de l'Hermitage vous ne pourrez pas les rater!


Pour les photographier... ce n'est pas évident pour les amateurs car ils sont bien installés sous les pins maritimes et regardent vers l'ouest. Donc préférez le soir, mais pas trop tard.

Et en guise de conclusion le regard d'un autre Nantais qui y est installé depuis un peu plus d'un an: Marwan qui respecté la consigne et n'a pas donné la réponse... avec une invitation, visiter ses galeries photos

http://www.pbase.com/mwhabib/nantes&page=1

et notamment celle consacrée à Nantes... et l'idée du prochain billet...

lundi 25 mai 2009

l'homme et l'enfant

Petit jeu pour les "non nantais" Quelque part sur les hauteurs de Nantes, il y a les statues d'un homme et d'un enfant.
Qui sont-ils?
Deux indices: Si vous trouvez qui est l'homme, vous trouverez l'enfant. Mais l'homme n'est pas le père de l'enfant.

dimanche 24 mai 2009

...les bleus de la mémoire ...

2004. Jeudi de l'Ascension. L'après-midi.
Il fait beau, très beau et il fait bon, si bon à lire au soleil.
Mais tout devient gris, très gris et froid, très froid après un simple coup de téléphone.
"Ses reins ne fonctionnent plus. Il n'en a plus que pour 24 heures, 48 tout au plus."
Voilà. Maintenant après tout un automne et un hiver à attendre, on y était.

Et dans le printemps, pour oublier la mort qui s'en venait, il n'y avait qu'un endroit: le bassin aux iris. A la recherche de la fleur idéale: bleu sombre, presque noir.
Comme la nuit qui bientôt tomberait sur lui.Le lendemain en fait. Une date qui pendant 5 ans fût impossible à retenir.

Il faisait beau encore le samedi qui suivit, avec un ciel bleu qui fait fermer les yeux ou chercher l'ombre. Mais pas celle d'une chambre funéraire que des lys blancs embaumaient.
Des fleurs bien éloignées de celles qu'il aimait en réalité: les fleurs sauvages. Le lundi 24 mai, à l'église, sa femme en déposa sur le cercueil une brassée qu'elle était allée cueillir quelques heures auparavant dans leur jardin et les champs aux alentours de leur maison.

Elles fanèrent vite car il faisait beau, très beau tout comme un peu plus tard dans l'après-midi, tandis que les proches attendaient, non dans les salons d'attente, mais assis par petits groupes sur les pelouses du crématorium.
Le soleil s'est juste voilé un instant lorsque l'employé des pompes funèbres a déposé dans les bras de son fils l'urne bleu foncé avec son nom inscrit en lettres d'or suivi de deux dates: 1950-2004.
Elle était encore chaude et il la portait comme on porte un enfant.

C'était il y 5 ans.
C'est le temps qu'il a fallu pour oser remonter sur les doigts le temps et mettre enfin une date sur ce jour-là, celui de sa mort: le 21 mai. Et accepter.

Cinq ans plus tard les iris qui désormais me semblent les plus beaux ce ne sont pus les bleus-noirs. Ce sont ceux qui ont des pétales bleus veinés de blanc, comme les nuages qui s'étirent très haut dans le ciel et un coeur d'étamines jaunes soleil.




Accepter. Enfin, commencer à accepter... car jamais billet ne fut si difficile à mettre en forme et ce n'est qu'après une nième relecture que cette date du 21 mai, une fois de plus esquivée par les hasards (?) de la rédaction, inscrite.

samedi 23 mai 2009

enfant: jouer, adulte: ne pas oublier de rêver

Dans la suite logique de l'art de jouer oublié par tant d'enfants devenus adultes, de l'art de flâner dans les rues désertes de Nantes un jour férié, pas très loin du "chat du jardin d'enfants", deux rues plus loin en fait, deux "boutiques " (ce qui explique les reflets) autour de l'art de rêver ...

- rue Jean-Jacques Rousseau, pour les petits garçons devenus grands, enfin dans leur corps parce que dans leur tête et leur coeur ils imaginent très bien piloter des trains ou des avions, d'aujourd'hui...

... ou d'hier. Car là aussi réside l'un des avantages de ne pas avoir oublié la capacité de rêver, celle de se promener dans l'espace et le temps.







- Et dans le passage Pommeraye, une vitrine consacrée aux créateurs et autres stylistes de mode nantais, pour les petites filles devenues grandes, enfin dans leur corps parce que dans leur tête et leur coeur elles imaginent très bien porter de telles robes, quelles que soient les circonstances, juste pour le plaisir... de rêver

vendredi 22 mai 2009

jardin d'enfants

Il est tard alors les explications au sujet de cette photo prise dans une rue du centre ville de Nantes, ce sera pour plus tard dans la journée. D'ici là, imaginer ce que pourrait être l'histoire de ce drôle de chat.

Plus tard donc...
L'histoire est en réalité simple et très jolie, l'inverse de celle racontée par Jacques Dutronc dans "le petit jardin".
http://www.wat.tv/video/jacques-dutronc-petit-jardin-mbq5_m6b0_.html

Rue de la Héronnière, attenant à une école primaire, depuis plusieurs années il y avait un emplacement devenu vide depuis qu'une maison en ruine avait été abattue. Vide? Enfin pas vraiment puisque des voitures y stationnaient de manière un peu anarchique, sous la garde de ce chat dessiné par un taggeur de passage (qui en avait aussi déposé un sur les murs de la fac de médecine à environ un km de là).
L'école est finalement devenue propriétaire de ces quelques m² et a décidé d'y créer un jardin pédagogique. Consultés sur son aménagement, un consensus s'est très vite fait entre les enfants: il faudrait garder le dessin sur le mur parce qu'à force de le voir tous les jours en allant ou revenant de l'école, c'était devenu "le chat", non, "leur chat".

Les enfants d'alors sont devenus collégiens et d'autres les ont remplacés pour lesquels le jardin pédagogique semble avoir perdu sa vocation première.
Mais qu'importe, le chat est toujours là et je ne manque jamais l'occasion de faire un détour pour aller le saluer lorsque je passe dans le quartier.

jeudi 21 mai 2009

Echos... (3)

C'est en recherchant deux livres mentionnés dans des commentaires déposés chez d'autres bloggeurs que, dans la bibliothèque, sa couverture a attiré l'attention.
Un petit livre qui en recouvre en réalité deux, parus initialement au Seuil en 2000 et 2002, mais lus beaucoup plus tard, après qu'ils aient été regroupés en 2007 en un seul volume de la collection point: "Chaque jour est un adieu" et "Un jeune homme est passé"


267 pages remplies de bonheurs, de tristesses... la vie quoi, celle d'Alain Rémond dont j'aimais tant retrouver la plume pleine d'humour, de cet humour si plaisant, acide avec une pointe de tendresse et parfois même d'auto-dérision, dans la rubrique "Mon oeil" du temps où il officiait à Télérama.

A l'origine c'était un passage consacré au jeu qui était resté en mémoire. Mais en le recherchant, en feuilletant l'ouvrage, plein d'autres passages reviennent en mémoire et incitent à penser que ce livre-là va revenir sur ce qui sert de table de chevet. Parce que ce livre là, tout comme le livre dont il sera probablement question demain, est un de ceux dont chaque relecture parle, à la fois pareil et différent, autrement.

"(...) Quand on est grand on ne joue pas (...) Un jour on ne sait plus jouer. On oublie le secret. On ne comprend plus ce que ça veut dire, en quoi ça consiste. S'inventer des vies, y croire dur comme fer, un jour, c'est fini, ça s'arrête d'un seul coup, comme ça, du jour au lendemain. Je me demande si ce n'est pas le pire jour de la vie: la perte du jeu, l'oubli du jeu. On y passe tous. Un jour ça a été mon tour. Mais j'en ai profité jusqu'au bout, jusqu'à la dernière minute, à la dernière seconde. (...) Un cadeau du ciel. (...) Après quand on a passé la barrière, franchi la frontière, c'est fini, on ne peut plus revenir en arrière. Jamais.(...)"

mercredi 20 mai 2009

Echos... (2)

... à un billet de Caillou Blanc sur http://www.accueil-beausoleil.com/ où elle parle de "La lionne blanche" de Henning MANKELL, un auteur qui vit entre Mozambique et Suède. Un auteur connu grâce à un psychiatre qui avait évoqué en 2006 un autre de ses livres qui venait alors de sortir.
Certains diraient que c'est un polar suédois. Je l'ai lu comme ce qu'il est affiché: un roman, certes policier puisque paru initialement en France dans la collection Seuil policier, mais un roman.

Et surtout je voulais retrouver l'endroit exact dont ce psychiatre m'avait parlé: celui qui a trait au voyage, non à un voyage, non, à CE voyage que chacun doit avoir fait dans sa vie. Il en est question page 227, mais d'une certaine manière plusieurs personnages du livre "voyagent", chacun à leur manière.
Il y a tant de manières de voyager dans l'espace, le temps... parfois même en restant apparemment immobile, en soi-même.

Voici ce que dit ce passage tiré du "retour du professeur de danse"

"Je serai bientôt rentré. Tu me manques. Je ne t'ai pas été infidèle. Mais ce voyage était très important pour moi.J'ai un peu l'impression d'avoir voyagé en rêve (...) C'était nécessaire pour moi de venir ici (...) Je commence à me faire vieux (...) Un homme de mon âge doit faire un voyage, au moins une fois, en sa propre compagnie. Pour découvrir qui il est en réalité. A mon retour, je serai quelqu'un d'autre (...)"

mardi 19 mai 2009

... A comme...

Michel Pastoureau dans son livre "Bleu" rappelle que, avant la découverte de l'indigo, la couleur bleue obtenue à partir de la guède était peu stable. En serait-il de même de certains sentiments? Il faut croire que oui. Au hasard du net, il arrive que l'on trouve des mots qui correspondent tellement à ce que l'on ressent à ce moment là que l'on ne peut que mettre leurs références en signet, pour un jour dont on espère qu'il n'arrivera jamais. Ainsi au début du printemps il y eu deux sites dont les intitulés renvoyaient à la couleur bleue mais aussi au blues de leurs auteurs.

http://leblogdemyrtille.blogspot.com/

http://delphine-encoreetencore.blogspot.com/

Et puis le temps passe sans que l'on oublie ces mots-là.

Il y a le fleuve. Il coule. Lui est débout, à côté de moi. Je le regarde. Il ne dit rien. Il regarde au loin. Là où le fleuve se perd dans la vallée, en amont. J’aurais voulu lui prendre la main. Je ne l’ai jamais fait. Tant de fois j’ai rêvé de cette main toute proche dont je ne connais même pas la sensation sur ma peau. Mais je l’ai regardée. C’est une main qui écrit, une main qui rêve.(...) Il se tait. Je me tais aussi. Il a besoin de marcher. Il ne sait pas que je me raconte une histoire.Je me raconte l’histoire de notre amour qui n’existe pas. (...) Nous resterons ainsi, proches et lointains à la fois dans un silence symétrique.(...) J’ai cessé depuis longtemps de pleurer le manque de lui. Il a voulu m’éloigner, souvent. Je suis partie pour ne pas avoir mal. Je suis revenue, toujours. Si ma vie est ailleurs, mon amour est intact. Mais il me semble voir encore, très loin, tout au fond de ses yeux, une vague lueur, une fugitive tendresse dans laquelle je me perds un instant, rêveuse, encore, de ce qui n’a pas été. Et ne sera jamais.

J'ai un ami. J'avais un ami. J'ai un ami. Je ne sais pas. Je ne sais plus. L'amitié doit-elle être réciproque? Peut-elle se nourrir de souvenirs? J'avais un ami, je comptais pour lui. Je signifiais quelque chose pour lui. J'ai trop peu répondu à sa main tendue, je n'étais pas prête. J'avais besoin de lui mais n'avais rien à lui donner. J'ai réalisé peu à peu, malgré toutes les différences, malgré les distances -le temps aussi bien que les kilomètres- combien il était important pour moi. Et je m'enrichissais. Mais aujourd'hui les choses ont changé, la page est tournée, pour lui en tout cas, je crois. Qui suis-je à ses yeux? Une étrangère encombrante, insignifiante, différente. Une pierre, mais non, je serais quelque chose déjà. Une ombre, oui, l'ombre d'un souvenir, l'esquisse d'un sourire, d'une larme momifiée, c'est déjà ça. J'aimerais tellement qu'il en soit autrement.

lundi 18 mai 2009

Christin & Bilal au fil du temps (3)

"les phalanges de l'ordre noir" ou "une bataille d'arrière-garde au goût amer et désabusé". L'histoire publiée en 1979 chez Dargaud commençait ainsi:

Pritchard, journaliste anglais, parce que son rédacteur en chef n'accordait que peu d'intérêt au massacre par "les phalanges de l'ordre noir" de la population d'un village espagnol où il avait avait combattu 40 ans plus tôt dans une unité des "brigades internationales" décidait de reconstituer celle-ci "...on va voir si des reliques de mon genre ont encore assez d'illusions pour une aventure..."

Au coeur de l'hiver 78 se retrouvaient alors l'Américain Donahue "toujours prêt pour la castagne... et sans doute un peu las de jouer les les patrons de son syndicat des coupeurs de viande", le français Barsac "ancien officier ... gaulliste passé à la non violence..., un homme de fidélité", le Danois Avidsen "ministre social-démocrate mondain dans l'âme... mais aussi un aventurier, un joueur sous son vernis raffiné", l'Italien Di Mano "comme juge il a raté sa carrière... trop indépendant... mais c'est un juste" l'Israëlien Katz des services secrets "un curieux de nature", l'ex Tchèque Stransky, "ex communiste, ex ingénieur, ... exilé en Suisse depuis le printemps de Prague", la polonaise Maria Wietniewska "devenue romancière pour enfants", l'Allemand Kessler "professeur emmerdant, même à Heidelberg ... sous le coup d'une menace d'interdiction professionnelle pour cause d'anarchisme verbal" et l'Espagnol Casteljon "un drôle de curé ... qui connaissait le pays basque comme sa poche"

A la poursuite de leur anciens ennemis, comme eux de plusieurs nationalités, commençait alors une longue errance à travers l'Europe: Espagne, Italie, Suisse, R.F.A., Pays-Bas et France où ils se retrouvaient enfin l'automne venu, face à face.
Entre-temps la mort s'était régulièrement invitée: la mort des corps, mais aussi d'une certaine manière la mort des idéaux pour lesquels ils avaient combattu: "Au fil des rencontres ... tout devenait trouble et les phalanges paraissaient soudain irréelles...Personne n'en avait entendu parler et de toute façon personne ne semblait s'y intéresser...Que représentaient les rescapés oubliés de brigades elles aussi oubliées pour tous ces jeunes gens au verbe vif et aux manières calmes? Pas grand chose sans doute... Que représentaient pour des vieux hommes aux chairs affaissées ces jeunes filles aux corps souples qui parlaient de techniques douces et de crèches non répressives? Pas davantage probablement. Deux lignes d'action, deux tranches d'espoir et plein de lambeaux d'histoire cruelle, se croisaient là sans se parler vraiment"


Et peut-être pire que tout: le doute qui au moment de l'assaut final lui fait penser "... étrange impression que de voir enfin si près ces hommes que nous poursuivions depuis si longtemps... vieillards infâmes observés par d'autres vieillards peut-être aussi infâmes...sans doute méritaient-ils l'enfer et sans doute le méritions-nous autant qu'eux... car ce fût l'enfer..."

Après il ne restait plus à Pritchard qu'à conclure l'histoire par "...je me demande si je ne suis pas mort aussi... ou alors c'est le monde qui est mort pour moi. Parce que je suis devenu trop vieux pour lui. Moi ... qui ai fait tuer tous mes amis pour une raison dont je n'arrive plus vraiment à me souvenir."

dimanche 17 mai 2009

... le 17 mai 2008...

Ce jour-là, il y a eu un appel téléphonique, très bref. On dit parfois que les grandes joies sont muettes; les mauvaises nouvelles, elles, n'ont pas besoin de beaucoup de mots.

"Le médecin a demandé à nous voir hier. Il avait les résultats du scan: cancer digestif généralisé. Il lui reste un, deux mois maximum à vivre."




Elle tiendra un mois, le temps de faire ses adieux.

Mais à chaque fois que je revois son regard si triste, si lointain, lorsqu'en début janvier de cette année là je l'avais photographiée, à l'occasion de leur soixante ans de mariage, il est difficile de ne pas penser qu'elle nous avait déjà un peu quittés.

samedi 16 mai 2009

Grisaille et Couleurs

Que faire un jour où le soleil passe principalement son temps à jouer à cache-cache avec les nuages poussés par le vent d'ouest ...

Hier, la réponse était dans l'affiche à l'entrée sud du pont de Pirmil, tout au bout d'une succession de parterres fleuris.

D'où, le vendredi 15, le silence du chat parti au milieu de la foule faire moisson de couleurs et d'images... Et aujourd'hui il repose ses petites pattes, ses yeux, ses oreilles avant de s'attaquer au second tri des près de 200 photos qui restent...

jeudi 14 mai 2009

Christin & Bilal au fil du temps (2)

Il est tard. Très tard. Alors le billet un peu plus détaillé que je voulais consacrer au seul "les phalanges de l'ordre noir" ce sera pour demain...

... ou d'ici quelques jours car cette BD là, peut-être plus que les trois précédentes (regroupées sous le cycle des "histoires fantastiques" dont il a été question jusqu'alors) mérite plus que les quelques lignes qui parfois la décrivent:
" Une bande d'anciens combattants des Brigades Internationales tentent de déjouer un complot ourdi par de vieux Franquistes nostalgiques." Peut-être à cause de la petite phrase ajoutée par l'internaute qui en parlait et que je partage complètement: "Une bataille d'arrière garde au goût amer et désabusé." Sentiment éprouvé dès la 1ère lecture, il y a près de trente ans de cela et aujourd'hui encore plus fortement.

De la belle ouvrage qu'ont réalisée là Messieurs Enki Bilal et Pierre Christin.
13 années séparent ces deux hommes puisque E. Bilal est né le 7 octobre 1951 à Belgrade et P. Christin le 27 juillet 1938 à Saint Mandé.

L'un et l'autre ont suivi des cheminements bien particuliers où le premier a mis en place petit à petit son univers tant graphique que fictionnel bien spécifique tandis que l'autre explorait une veine scénaristique très influencée par ses études initiales (Sorbonne et Institut d’études politiques de Paris) ... et pourtant ils se complètent bien dans cette histoire fictive et pourtant complètement ancrée dans la réalité de la vie des années 70/80 qui se rattache au cycle des "légendes d'aujourd'hui" : "les phalanges de l'ordre noir"

mercredi 13 mai 2009

Christin & Bilal au fil du temps (1)

Il y a un an, le 1er vrai billet était consacré à ce tableau d'un peintre du XVIIème: Johannes Veermer. Cette fois ci, il sera question d'un duo dont en près de 30 ans les oeuvres ont beaucoup évolué, même lorsqu'on examine leurs 3 premières oeuvres communes éditées en 3 ans, de 1975 à 1977 : "la croisière des oubliés", "le vaisseau de pierre" et "la ville qui n'existait pas".

Plus que l'évolution du graphisme de Bilal qui au fil du temps devient moins hachuré (comme le faisait Gir(aud) quand il dessinait Blueberry) ou de sa palette chromatique qui passe de la dominante verts/marron au gris/bleuté, ce sont les histoires inventées par Pierre Christin qui sont intéressantes à raconter car elles indiquent comment, dans cette société post-soixante-huitarde, les choses ont pu évoluer par rapport à un certain nombre de valeurs.

Dans "la croisière des oubliés" profitant d'une expérience en cours dans une base militaire implantée dans les Landes, grâce à un mystérieux étranger, tout un village s'envole pour échapper aux militaires qui grignotent petit à petit ses terres et projets d'aménagement des sols (extension de l'usine polluante, de la marina...).
"... fable anarco-écolo, où on se prend à rêver à un monde impossible..." Voilà comment la qualifie un internaute. Et il ajoute: les "petits gagnent le droit de rester sur leurs terres dans des conditions décentes quand les puissants militaires et politiques inclus s'en sortent avec des séquelles qui les feraient sans problème figurer dans quelque film de science-fiction".

Le point de départ est quasiment le même dans "le vaisseau de pierre". L'internaute précité parle ainsi de cette aventure: "... Quand les morts aident les vivants, aucune bataille n'est jamais perdue d'avance. Les combattants du vaisseau de parviendront-ils à déjouer le complot des requins, promoteurs et politiciens véreux qui veulent défigurer leur Terre ? De l'écologie fantastique et poétique..."
Sauf que là pour contrer les projets immobiliers et autres d'un groupe, le petit village breton n'aura d'autre solution que de s'exiler grâce, toujours à ce même étranger mystérieux et à l'Ankou venu du fond des âges, dans la lointaine terre de feu. La désillusion pointerait-elle?

Le doute devient encore plus fort avec la 3ème aventure: "la ville qui n'existait pas" où intervient ce mystérieux étranger qui a convaincu l'héritière en fauteuil roulant qui s'était retirée du monde d'utiliser autrement les fonds dont elle hérite de son père qui était à la tête d'un empire industriel.
L'internaute commentateur parle ainsi de cette aventure: "Une ville de rêve, où les enfants sont rois, les femmes libres, les hommes égaux, heureux et sans souci. Où l'on vérifie une nouvelle fois que l'utopie comme l'enfer ont ceci de commun qu'ils sont tous deux pavés d'excellentes intentions." Car la fin est amère puisque, observés de son donjon par l'héritière, les habitants de cette ville idéale (???) sont confinés dans celle-ci tandis qu'elle est désormais "protégée" par des vigiles.

Moins de 10 ans après mai 68, le temps de rêves était-il déjà révolu?
Ce sentiment sera encore plus fort avec l'ouvrage suivant du duo.