samedi 28 mars 2015

"l'artiste et son modèle" de Fernando Trueba

Voilà un film que je ne suis pas allée voir à sa sortie, même si la présence de Jean Rochefort laissait présager quelque chose d'intéressant. Probablement parce que le résumé de l'histoire laissait craindre de fortes ressemblances avec le fort long film "La Belle Noiseuse". Et puis il était en N&B. 
Puis j'ai connu l'histoire de Dina Vierny qui a posé pour Maillol et découvert un certain nombre d'images extraites de ce film sur FB. Alors quand il a été programmé dans le cadre du festival du film espagnol, je n'ai pas hésité. Et s'il est exact que, par certains côtés, on retrouve le film "La Belle Noiseuse", c'est autre chose qui est raconté, et de façon plus succincte.
Parmi les choses écrites au sujet du film de Rivette, il y avait ceci: "...la possession est-elle possible ? l'idée de posséder quelqu'un, sinon quelque chose de quelqu'un, n'est-elle pas pure folie ?" Mais aussi les portraits de Michel Piccoli en "peintre désabusé qui ne croit plus en son génie créatif" et de  Emmanuelle Béart en "muse et victime à la fois docile et rebelle, mise à nue, malmenée, dont le corps est brisé par les contorsions que lui impose le peintre"
Ici, il y a plus, notamment à cause du moment où se situe l'action: la 2ème guerre mondiale et de quelques rôles secondaires plus étoffés.
Ainsi la femme du peintre (Claudia Cardinale) qui a longtemps posé pour lui et recrute, un peu sur un coup de tête, une jeune réfugiée espagnole entrevue endormie sur les marches d'un porte. On est donc dans une autre démarche que celle du jeune peintre qui "vend" sa compagne à un autre. Et cette jeune modèle va, tout comme Dina mentionnée ci dessus, aider des maquisards, notamment en leur faisant franchit la frontière.  Ou bien encore ce jeune maquisard blessé qui refuse de se séparer des livres qu'avait emporté avec lui un jeune américain mort avant même d'avoir pu combattre, quitte à les mettre tous en danger. 
Ou encore ce gradé de la Wehrmarcht, qui, juste avant de partir sur le front de l'Est dont il craint de ne pas revenir, rend une dernière visite au sculpteur en lui montrant le livre qu'il a commencé à écrire à son sujet.
Oui, il y a plus, on voit réellement comment le sculpteur tâtonne, de croquis en tableaux en passant par petites ébauches de glaise pour trouver l'idée, celle qui s'imposera... et ressemblera fort à une statue de Mailol pour laquelle Dina avait posé. 
Il y a aussi le recours au N&B, quelque chose de rare mais au sujet duquel le réalisateur s'est expliqué en début de séance: pour lui c'était une manière d'être fidèle à ses souvenirs d'enfant collectionneur de photos d'ateliers d'artistes.
Dernière chose: la fin du film est très belle et très triste: la femme du sculpteur s'est absentée pour quelques jours et la jeune modèle est partie rejoindre sa famille. Le sculpteur qui a fait sortir le plâtre qui lui servira de modèle pour tailler la pierre mise de côté depuis des années par son ami le marbrier est seul. Tout au long de la journée l'ombre des feuilles danse que la pierre... qu'il ne taillera jamais car le film s'achève sur l'image d'oiseaux qui s'envolent, effrayés par le coup de feu du fusil qu'il a emmené avec lui, en même temps qu'une tranche de pain qu'il a arrosée d'huile d'olive pour son dernier repas.

Aucun commentaire: