samedi 12 juillet 2008

... et se perdre un jour

Il y a ceux que la vie sépare très tôt l'un de l'autre. Et quand les conditions de la "séparation" laissent planer un doute, fût-il minime, il est encore plus difficile d'entamer le difficile "travail de deuil". Consuello en a fait l'expérience, elle qui pendant des années écrivit une lettre le dimanche à son "Tonio" disparu le 31 juillet 1944: Antoine de Saint-Exupéry dont on ne retrouvera qu'en 1998 la gourmette en argent avant que le restes de son avion ne remontent à l'air libre en 2003... Bien après donc que la "Rose" ait rejoint l'auteur du "Petit Prince"
Et pour ceux qui vivent, jour après jour, année après année, l'un près de l'autre, un homme a bien décrit la souffrance de cette fin de vie: Jacques Brel dans sa chanson "les vieux" "...Les vieux ne meurent pas, ils s'endorment un jour et dorment trop longtemps
Ils se tiennent par la main, ils ont peur de se perdre et se perdent pourtant
Et l'autre reste là, le meilleur ou le pire, le doux ou le sévère
Cela n'importe pas, celui des deux qui reste se retrouve en enfer..."
Certains ne l'acceptent pas. Ainsi le philosophe André Gorz. En septembre 2006 il avait fait paraître "Lettres à D. Histoire d’un amour " au sein duquel il écrivait ceci:
"...Tu vas avoir quatre-vingt-deux ans. Tu as rapetissé de six centimètres, tu ne pèses que quarante-cinq kilos et tu es toujours belle, gracieuse et désirable. Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t'aime plus que jamais. Récemment, je suis retombé amoureux de toi une nouvelle fois et je porte de nouveau en moi un vide débordant que ne comble que ton corps serré contre le mien ..."
Il concluait son livre, non sa lettre à D. par:
«... Nous aimerions chacun ne pas survivre à la mort de l’autre. Nous nous sommes dit que si, par impossible, nous ­avions une seconde vie, nous voudrions la passer ensemble.»
Il savait alors depuis de nombreuses années que sa femme était atteinte d'une très douloureuse maladie incurable contractée suite à une intervention médicale.
Alors un an après la publication de son ultime livre il a décidé que Dorine et lui partiraient ensemble.
Pour moi ils resteront à jamais jeunes, dans cette posture décrite par Antoine de Saint-Exupéry: "Aimer ce n'est pas se regardre l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans une même direction"

2 commentaires:

Anonyme a dit…

« J’entends cela » et je pleure. Je ne saurai dire si c’est de peine ou de bonheur mais cette eau « qui lave l’âme et le cœur » ne m’a pas demandé mon avis. Ma compagne, qui n’est plus, « partagerait bien » ces moments-là.
Merci.

@nn@ L. a dit…

Votre compagne n'est plus physiquement. Mais si ce que j'ai cru comprendre entre les lignes de ce que vous écrivez (et plus particulièrement le 6 juillet dernier) est exact, en réalité elle vous accompagnera et partagera toujours ces moments-là avec vous.