mardi 23 décembre 2008

Dans le labyrinthe de la mémoire (3)

Deux personnes ont chanté Orly. La version de Jacques Brel crée en 1977 est de loin ma préférée même si, même si l'histoire qu'elle raconte est déchirante.

Ils sont plus de deux mille Et je ne vois qu'eux deux La pluie les a soudés Semble-t-il l'un à l'autre Ils sont plus de deux mille Et je ne vois qu'eux deux Et je les sais qui parlent Il doit lui dire je t'aime Elle doit lui dire je t'aime Je crois qu'ils sont en train De ne rien se promettre Ces deux-là sont trop maigres Pour être malhonnêtes Ils sont plus de deux mille Et je ne vois qu'eux deux Et brusquement il pleure Il pleure à gros bouillons Tout entourés qu'ils sont D'adipeux en sueur Et de bouffeurs d'espoir Qui les montrent du nez Mais ces deux déchirés Superbes de chagrin Abandonnent aux chiens L'exploit de les juger La vie ne fait pas de cadeau Et nom de Dieu c'est triste Orly le dimanche Avec ou sans Bécaud Et maintenant ils pleurent Je veux dire tous les deux Tout à l'heure c'était lui Lorsque je disais "il" Tout encastrés qu'ils sont Ils n'entendent plus rien Que les sanglots de l'autre Et puis Et puis infiniment Comme deux corps qui prient Infiniment lentement Ces deux corps se séparent Et en se séparant Ces deux corps se déchirent Et je vous jure qu'ils crient Et puis ils se reprennent Redeviennent un seul Redeviennent le feu Et puis se redéchirent Se tiennent par les yeux Et puis en reculant Comme la mer se retire Il consomme l'adieu Il bave quelques mots Agite une vague main Et brusquement il fuit Fuit sans se retourner Et puis il disparaît Bouffé par l'escalier La vie ne fait pas de cadeau Et nom de Dieu c'est triste Orly le dimanche Avec ou sans Bécaud Et puis il disparaît Bouffé par l'escalier Et elle elle reste là Coeur en croix bouche ouverte Sans un cri sans un mot Elle connaît sa mort Elle vient de la croiser Voilà qu'elle se retourne Et se retourne encore Ses bras vont jusqu'à terre Ça y est elle a mille ans La porte est refermée La voilà sans lumière Elle tourne sur elle-même Et déjà elle sait Qu'elle tournera toujours Elle a perdu des hommes Mais là elle perd l'amour L'amour le lui a dit Revoilà l'inutile Elle vivra de projets Qui ne feront qu'attendre La revoilà fragile Avant que d'être à vendre Je suis là je la suis Je n'ose rien pour elle Que la foule grignote Comme un quelconque fruit.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Je ne me souvenais plus des paroles entièrement et de les voir ainsi écrites est très dur ,poignant de vérité
Que de tristesse en ce moment Anna ,le coeur fait physiquement mal
Vite ,Anna ces belles feuilles rouges du Poincetta chaque année aussi j'aime avoir ce flamboiement à la maison pour reposer les yeux dans la chaleur irradiante
A mitiés

Anonyme a dit…

C'est très beau digne de Grand Jacques. Orly comme tous les aéroports voire comme toutes les gares sont des lieux de déchirements ou l'on se sépare. Heureusement cela peut être aussi des lieux de retrouvailles et de joie et en tous cas de découvertes.

Anonyme a dit…

Labyrinthe ou "passage" vers les marges de la Mémoire ?

Des lieux à fréquenter "avec innocence" (sourire)

Jean a dit…

Pourquoi aujourd'hui les compositeurs ne créent plus de merveilles semblables ?

Musique émouvante , texte poignant , timbre de la voix extraordinaire , implication psychologique de l'interprète parfaite ...

Pourquoi , dans les nouvelles générations , les Brel , Brassens , Piaf , Barbara , Ferrat et tant d'autres ne reviennentils pas ?

Je vous prie de me pardonner d'avoir tant tardé à répondre à votre dernier mot .
Je viens de traverser une période pénible et je n'allais que très peu vers internet .
J'espère que vous oublierez ma négligence .
Je vous souhaite le plus beau des Noels , entourée de ceux que vous aimez .

Anonyme a dit…

Bonne fin d' année à vous .
Je suis jamais bien loin mais je ne sais pas tjs dire ce qu' il faut.
Surtout quand les personnes sont fatiguées.Pensée et amitié de Noisette.

cailloublanc a dit…

Merci @nn@ de prendre la peine de recopier les paroles des textes, ce qui nous permet de mieux les vivre en les lisant de près... Ce texte est l'un de mes préférés de Brel... Talent poétique qui remue les tripes... Merci! Et belle soirée demain au milieu des vôtres...

@nn@ L. a dit…

Beaucoup plus de commentaires que je ne l'aurai cru autour de ce très beau mais très triste texte de Jacques Brel. J'y répondrai un peu plus tard quand j'aurai un petit peu plus de temps.
Et en attendant, pour vous tous, commentateurs ou simples lecteurs, pour vous remercier, un très joli sourire déposé ce 24 décembre.

@nn@ L. a dit…

Voilà, voilà, je suis de retour "at home" (avant d'être de nouveau absente demain) et un petit peu de temps devant moi pour répondre

* Ce n'est que tardivement Arlette que j'ai découvert ce texte de Brel. Peut être est-ce pour cela qu'il m'a autant touchée car derrière lui je vois toutes les "séparations"
Tristesse actuelle? Je crois que malgré l'euphorie de circonstance de l'approche des fêtes beaucoup de personnes éprouvent dau fond d'elles du mal être.
Les "Poinsetta" c'est un peu un souvenir d'enfance lié à ma mère . Ces feuilles/fleurs rouges ou vertes m'ont toujours fascinée. Peut-être parce que dans le grisaille de l'hiver, c'était les seules taches de couleur.

* Vous avez raison Caphadock, les gares et les aéroports sont aussi des lieux de retrouvailles. Mais il est parfois plus "facile" de se souvenir des choses tristes que heureuses.

* Effectivement Michel, "labyrinthe" mais aussi "passage" vers les marges de la mémoire, un peu comme ces passages parisien ou notre passage Pommeraye qui dessert le quartier bas (les anciens quai du port, du quartier haut)

* Je pense Jean qu'il existe encore des auteurs mais vu le niveau général des chaines de radio qui, quelques stations comme FIP mises à part, servent de la "soupe" de tubes formatée aux goûts du temps, il est encore plus difficile qu'autrefois pour eux d'émerger.
Pour le reste du commentaire je passerai par la messagerie (sourire)

* Bonjour délicieuse Noisette, ne voyant plus votre signature ni ici, ni chez Gene, ni même chez immémory (qui se fait rare) je me demandais ce que vous deveniez.
Pour vous aussi je passerai par la messagerie (sourire)

* Heureusement Gene que depuis que paroles.net n'est plus autorisé à publier les textes des auteurs que d'autres sites ont ouvert car c'est assez fastidieux de les recopier. Et pourtant, que parfois certains sont beaux bien au dela de la musique qui les accompagne. Beaux comme l'est la poésie, sauf que dans ce dernier cas, c'est notre humeur du moment qui écrit la "musique".
Effectivement soirée familiale,un peu particulière vu le contexte. Vous aussi vous aviez les vôtres auprès de vous. Pas de liens de sang mais des liens de coeur qui sont parfois tout aussi fort et n'est ce pas cela qui compte?