samedi 14 juin 2008

Destins d'Hommes (2) Guillaume Apollinaire, le mal-aimé si aimant

Il est temps maintenant de cesser de suivre à rebours le cours de la Loire pour évoquer un homme qui n'en a, à ma connaissance, jamais parlé. Par contre dans un poème, sans doute l'un de mes préférés, comme de beaucoup d'autres personnes, il mentionne un autre fleuve tant peint par les Impressionnistes: La Seine.
LE PONT MIRABEAU
Sous le pont Mirabeau coule la Seine Et nos amours Faut-il qu'il m'en souvienne La joie venait toujours après la peine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure
Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous Le pont de nos bras passe Des éternels regards l'onde si lasse
Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure L'amour s'en va comme cette eau courante L'amour s'en va Comme la vie est lente Et comme l'Espérance est violente Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Passent les jours et passent les semaines Ni temps passé Ni les amours reviennent Sous le pont Mirabeau coule la Seine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure
Ainsi Guillaume Apollinaire célèbrait-il ses amours défuntes à l'égard de l'une des nombreuses femmes qui ont traversé sa vie.
Guillaume Apollinaire, j'avais appris tant de poésies de lui durant mon enfance! Mais ça je ne le découvrirai que plus tard. Et ce sera grâce à un professeur de français passionné qui essaiera de rendre intéressant ses cours à des élèves scientifiques dont beaucoup prisaient fort peu la littérature.
Ainsi en dehors du poème "Zone" "A la fin tu es las de ce monde ancien..." qui figurait alors au programme, il avait choisi, sans doute par défi personnel, d'étudier longuement ce qui doit être le plus court texte de ce poète: "Chantre"
Et l'unique cordeau des trompettes marines
Il lui aurait pourtant été alors tellement plus facile de se contenter de parler à ses lycéens du poète mal aimé.
Guillaumme Apollinaire: "mal aimé"? Avec le recul, j'aurai plutôt tendance à écrire le "mal aimé mais si aimant" car que de femmes ont traversé sa vie:
Annie Playden
Marie Laurencin
Madeleine Pagès et
Louise de Coligny dite Lou, à laquelle il a dédié de fort beaux poèmes érotiques.
Finalement ce "mal aimé" épousera une "jolie rousse"" en ce mois de mai 1918: Jacqueline Kolb.Il ne vivra que peu de temps avec elle puisque, affaibli par les suites de la trépanation destiné à enlever un morceau d'obus qu'il avait dans la tête, il mourra de la grippe espagnole, deux jours avant que ne soit signée l'Armistice.

Et je resterai à jamais avec cette interrogation: quelle aurait été la teneur de ses poèmes à venir? Est-il possible d'imaginer le "mal aimé" écrivant, heureux, des poèmes d'amour comme le fit plus tard Paul Eluard, voire rédigeant un nouvel "art d'être grand-père"? La mort du "héros" permet parfois de préserver certaines rêves. Mais il existe une autre solution que la mort physique: la mort "psychique", celle qui consiste à rompre complètement avec la vie antérieure. Je songe notamment à celui qui pour moi restera un éternel adolescent aux semelles de vent.

7 commentaires:

arlette a dit…

Coincidences .. Je relisais les poèmes à Lou pour "cueillir" une phrase afin d'illustrer une esquisse Telle:
"Chaque fleur qui se fane
c'est un amour qui meurt
.....Les roses tour à tour effeuillent leur douleur"
merci pour ce rappel du" mal aimé"
chez Ossiane en ce moment les poètes maudits sont à l'honneur aussi AA

Anonyme a dit…

Que de mélancolie dans ce poeme que j'ai moi aussi découvert a l'ecole...mais apprécié bien plus tard.

@nn@ L. a dit…

Ce n'est qu'au lycée que j'ai découvert ce poème où tout est presque dit en trois vers :
"Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent"
Trois vers auxquels je ne peux m'empêcher encore et toujours d'en rattacher un autre :
"Et comme l'Espérance est violente"

Anonyme a dit…

Je l'aime si fort... depuis fort longtemps...
merci pour vos passages chère @nn@

Anonyme a dit…

Oui, comme l'espérance est violente!

Bonne journée.

Anonyme a dit…

Le pont des arts pas n'est pas si loin du pont mirabeau

@nn@ L. a dit…

Mine de rien, si je me fie à ce site:
12 ponts les séparent... mais il est exact qu'il suffit de se laiser porter par la Seine.

Et que Guillaume de sa tombe au Père Lachaise ne m'en veuille pas, je préfère les rives de la Loire à Nantes à celles de la Seine à Paris