jeudi 17 juillet 2008

L'armée des ombres

Ce film, il y a bien longtemps que je l'ai vu puisque je n'en gardais qu'un souvenir en noir et blanc. Or, je viens de m'apercevoir qu'il est en couleurs. La dernière fois que je l'ai vu je devais donc encore vivre chez mes parents... il y a au moins 26 ans de cela.
Et pourtant que de souvenirs ne m'a t il pas laissés. Il y a les très grands acteurs/personnages mentionnés à l'affiche:
Lino Ventura
/Paul Gerbier
Paul Crauchet
/Félix Lepercq
Christian Barbier/"Le Bison" et Mathilde jouée par Simone Signoret
Et tous les autres... qui illustrent ce qu'a pu être la résistance au quotidien. Un quotidien fait de risques et de doutes, non sur le pourquoi de l'engagement mais sur l'autre que l'on côtoie: qui est il réellement et peut-on ou non lui faire confiance. Au point que les deux frères Jardie peuvent ignorer faire partie d'un même réseau (Paul Meurisse et Jean-Pierre Cassel)
Et cela on le comprend très vite lorsque Gerbier qui a réussi à s'enfuir de la Gestapo où il allait être interrogé se réfugie chez un coiffeur (Serge Reggiani), a priori pétainiste, qui a très bien saisi ce qui se passait mais qui, sans mot dire, le rase, avant d'aller au sous-sol, non pas téléphoner à la police comme le craint Gerbier, mais prendre un autre manteau et de le lui donner afin qu'il puisse continuer sa fuite.
Il y a aussi cette scène éprouvante où les résistants qui on enlevé un jeune homme qui a trahi Gerbier vont l'exécuter en l'étranglant lentement, parce juste à côté de la maison isolée qu'ils avaient repérée la veille, vit une famille que les coups de feu alerterait.
Aparavant, "Le Masque", qui est nouveau dans le réseau et croit qu'un procès en bonne et due forme sera fait avant l'exécution, craque. Gerbier lui conseille d'avoir toujours du cyanure sur lui, avant de reconnaître, après l'exécution, que, pour lui aussi, c'était la première fois.
Le doute... Le doute empoisonne leurs vies au point de faire hésiter "le Bison" à exécuter Mathilde, pilier du réseau, mais qui a eu la faiblesse de garder une photo de sa fille. Ainsi, libérée sans avoir été torturée par la gestapo, s'apprête-t-elle réellement à trahir tout le réseau ou n'a-t-elle donné que quelques noms afin de les inciter à l'éliminer? On ne le saura pas. Mais il y aura ce long regard de Mathilde avant qu'elle ne soit tuée à bout portant, en ayant eu auparavant l'occasion de reconnaître ceux qui l'abattent.
Et Jean-Pierre Melville clôt son film, inspiré d'un livre que Joseph Kessel écrivit durant la deuxième guerre mondiale, à une époque où l'on ignorait comment elle se terminerait, en précisant, ce qu'il est advenu des autres protagonistes de l'ombre:
« Claude Ullmann, dit « Le Masque », eut le temps d'avaler sa pilule de cyanure, le 8 novembre 1943, Guillaume Vermersch, dit « Le Bison », fut décapité à la hache dans une prison allemande le 16 décembre 1943. Luc Jardie mourut sous la torture le 22 janvier 1944 après avoir livré un nom : le sien... Et le 13 février 1944, Philippe Gerbier décida, cette fois-là, de ne pas courir. »
Post-Scriptum
Au moment où le journal « Le monde » publie des articles sur « la mémoire » (le siège de son implantation dans le cerveau, ses modalités de fonctionnement...) sans le vouloir j'ai contribué à la question avec la confrontation des versions différentes de plusieurs personnes au sujet d'une question technique autour de ce film: - noir et blanc colorisé pour Ganesh (http://stephane-k.info/bloganesh/) et Verveinecitron (http://monjardinamoi.canalblog.com) - couleur pour Robert
Entretemps j'avais trouvé confirmation de la réponse de Robert dans l'article de Wikipedia au niveau de la fiche technique: Format : Couleur par Eastmancolor - 1.85:1 - Mais la petite cinéphile que je reste ne peux s'empêcher de rappeler le commentaire de Robert parce qu'il illustre bien la différence de travailler entre certains grands réalisateurs et d'autres que j'aurai la courtoisie de ne pas qualifier « Le film est bien en couleurs, mais ces couleurs sont peu saturées, presque délavées, procédé souhaité par Melville et appliqué dans d'autres films, tel "Le Samouraï" et dans une moindre mesure "Le cercle rouge" »

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Il a dû être recolorisé car j'en garde aussi un souvenir en noir et blanc. Pour le reste j'ai des images très floues en tête. Mais ton billet me donne envie de le revoir.

@nn@ L. a dit…

Verveinecitron, la page de wikipedia
http://fr.wikipedia.org/wiki/L'Arm%C3%A9e_des_ombres
est relativement bien faite (à moins que ce ne soit moi qui ait une bonne mémoire:-)))
Et en plus sur le net il y a plein de commentaires passionnants qui ont été fait à l'occasion de la sortie du film en DVD. J'y ai notamment appris que Meville s'entendait mal avec Lino Ventura, ce qui donne encore plus cette impression de colère rentrée du personnage, que Kessel, ce vieux lion, avait fondu en larmes en voyant la référence à ce qu'il était advenu de certains de ses anciens compagnons (comme moi d'ailleurs) etc, etc...

Anonyme a dit…

J'aime beaucoup les films de Melville. Tres belles bandes son, ambiances fort bien amenées. Par contre les versions colorisées ...c'est pas glop. Ca répond à une attente du public. Mais pour retrouver le film initial, je mets toujours en n&b et là c'est top moumoutte

@nn@ L. a dit…

Allons bon Ganesh, vous êtes le deuxième à me signaler que ce film a du être colorisé (chose que je déteste moi aussi et encore + quand le film a été fait à une époque où il y avait le choix) alors que je pensais que mes souvenirs étaient dus à la télévision en N&B de mes parents...et que sur Wikipédia il y a référence à une pellicule couleur...
Immense perplexité de ma part...

Anonyme a dit…

Passionné par l'oeuvre de J.P. Melville, je me permets d'intervenir pour lever toute perplexité : "L'armée des ombres" a été tournée en couleurs et n'a donc jamais été "colorisé"

Je comprends ce qui peut laisser ce genre d'impression surtout pour celles et ceux qui ont vu le film dans leur jeunesse ou leur enfance : Le fims est bien en couleurs, mais ces couleurs sont peu saturées, presque délavées, procédé souhaité par Melville et appliqué dans d'autres films, tel "Le Samouraï" et dans une moindre mesure "Le cercle rouge"

N'ayez donc plus aucun doute, le film est bien en couleurs.

Votre blog est très intéressant

Anonyme a dit…

merci pour le lien: j'y cours!

@nn@ L. a dit…

* Bonjour Robert,
et merci beaucoup pour ces précisions, à la fois technique sur l'absence de colorisation (et dont j'avais retrouvé trace dans l'article de Wikipédia) et plus "psychologique" avec la référence au choix fait par Melville quant au traitement de la couleur

* Bonjour VerveineCitron,
Quand vous reviendrez de vacances, n'oubliez pas d'explorer aussi les autres sites autour du film...