Ce goût non pas pour la cerise (film iranien) ni même celui du saké (film japonais... déjà) mais pour le cinéma de l'extrême orient et plus particulièrement japonais remonte probablement à une page de devoir de vacances réalisé, il y a plus de quarante ans. Le devoir en question tournait autour de la critique d'un film dont je reparlerai une autre fois: "l'île nue".
Quelques années plus tard, le "ciné-club" sur Antenne 2 le vendredi soir et le "cinéma de minuit" sur FR3 le dimanche soir m'ont permis d'un peu mieux connaître le cinéma japonais, celui des années cinquante notamment...S'il fallait ne retenir que trois films de cette période ce serait les suivants: un film de 1952: "le journal de O'Haru, femme galante" , un autre de 1953: "Voyage à Tokyo" et le dernier de 1954: "les 7 samouraïs".
Le film de Mizoguichi, en grande partie sous forme de flash-back, décrit la triste de vie d'une femme de bonne famille devenue prostituée. A travers son histoire, c'est le sort de la femme au Japon qui est décrit: une femme qui, sauf à de rares périodes pour O'Haru, n'existe que par rapport aux hommes, que ce soit son père, celui dont elle sera la seconde épouse ou son propre fils. Fille, épouse ou mère, mais toujours victime. L'une des images fortes qu'il me reste de ce film, c'est lorsque son fils devenu adulte et le chef d'une famille princière qui sans elle ce serait éteinte, après l'avoir fait rechercher lui signifie qu'il entend la cloîtrer à jamais dans sa maison, avec seulement la possibilité de le voir, de très loin... Alors elle fuira et deviendra une anonyme mendiante qui ira quêter l'aumône de maison en maison.Avec Ozu, c'est aussi la place de la femme qui est analysé, mais aussi le monde de la famille qui est longuement exploré. Un monde en apparence statique puisque filmé, sauf en ce qui concerne les tous derniers plans qui comprennent un travelling, sans aucun mouvement de caméra, cette dernière restant placée à hauteur de tatami. Mais ce monde bouge et le couple âgé qui se décide à aller voir ses enfants installés à Tokyo en fera la cruelle expérience. Pour eux ce voyage physique se doublera d'un exil intérieur car il se sentira rejeté et ne trouvera un peu d'attention qu'auprès de leur belle-fille. Mais celle-ci, devenue veuve sans enfant, n'a plus vraiment sa place dans cette famille.
Les fresques brossées par Kurosawa ne sont pas quant à elles autant centrées sur la famille mais concernent la société toute entière. Une société japonaise dure où il ne fait pas bon être pauvre ou isolé, même pour les samouraïs.
De cette histoire, dont la trame a été quasiment reprise dans son intégralité par le réalisateur du film "les 7 mercenaires" avec Yul Brunner, Charles Bronson et quelques autres pointures du cinéma américain, je ne retiendrai qu'une scène. L'un des 7 samouraïs cache, assez mal, qu'il est issu du peuple et qu'il veut fuir sa condition de paysan pauvre, l'un de ces paysans un peu couards qui n'hésitaient pas à tuer des samouraïs isolés mais désormais demandent leur aide. Il meurt lors du dernier combat, tant les paysans que ses compagnons samouraïs lui rendront les honneurs pour ce qu'il était dans l'âme, un véritable samouraï.Ces thèmes, importance de l'origine, de la famille, du clan, du poids des traditions... on les retrouve de façon plus ou moins explicite chez les cinéastes japonais contemporains, mais aussi chez d'autres cinéastes d'extrême orient qu'ils soient d'origine chinoise ou coréenne qui prendront le relais...
2 commentaires:
Ah le cinéma asiatique ...Bien sur Kurosawa. Je citerais volontiers Ran, vaste fresque inspirée par "Le roi Lear" de Shakespeare. Film vu a sa sortie avec deux amis musiciens. Puis revu à de nombreuses reprises.
Mais aussi "Les contes de la lune vague après la pluie" de Kenji Mizoguchi, vu au ciné club du lycée. Je terminerai en parlant d'un film étonnant de Peter Greenaway : "The Pillow Book" (désolé pour les défenseurs de notre belle langue française, mais le titre n'a pas eu de traduction française ... même si on pourrait aisément le traduire par "le livre de chevêt") Vision du Japon et de Hong kong par un occidental. Un délire d'images mêlant la calligraphie (souvent peinte à même la peau) , la culture asiatique traditionnelle, l'agitation du monde moderne, le choc culturel entre un européen et une asiatique.
"Ran" je ne l'ai vu qu'une fois, à sa sortie et en ne connaissant pas l'histoire du "Roi Lear" alors je ne garde le souvenir que de batailles flamboyantes de couleur.
Pour Mizoguchi, j'ai hésité justement longuement avec "les contes de la lune vague après la pluie" mais aussi "l'intendant Sansho"... mais j'avais décidé de n'en retenir qu'un par réalisateur
"The Pillow book" je ne l'ai pas vu car si une amie très portée sur le cinéma asiatique m'en avait parlé chaleureusement, avec notamment cette femme qui écrit sur la peau de ses amants... Greenaway, mis à part "meurtre dans un jardin anglais", j'accroche pas trop.
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