La bande son est aussi fabuleuse. Au début il y a un long moment où il ne se passe quasiment rien. Dans une lumière très faible un moine agenouillé prie, le poële de sa cellule ronfle, son prie-dieu craque un peu lorsqu'il se relève pour tourner la molette du poële ou s'asseoir dans la petite niche derrière lui. Plus tard, ces moines entrent petit à petit dans l'église plongée dans l'obscurité et où ne brille que la flamme rouge du tabernacle. Ils allument la lampe fixée à leur lutrin afin de consulter le chant du jour, puis l'éteignent avant de s'asseoir ou s'allonger sur le sol. A un moment ils se relèvent tous ensemble et commencent à chanter dans le noir quasi absolu, leurs voix se répondant de chaque côté du choeur. Et puis il y a ce jeune moine qui, au bout de quelques mois, est autorisé à lire le texte du jour en psalmodiant de cette manière si typique, presque chantée. Entre-temps, il y aura le bruit du vent dans les arbres, celui de la neige qui étouffe les sons, celui de la pluie, les brocs que l'on rempli d'eau, les sandales qui frôlent la pierre claire des couloirs, la cloche qui rythme les activités...
dimanche 10 août 2008
"Le grand silence"
Certains films doivent une partie de leur notoriété à leur musique. Ainsi le thème de Anton Karas dans le film "le troisième homme" de Carol Reed
ou, dans un genre très différent, le "Calling you" de "Bagdad Café" réalisé par Percy Adlon,
ont beaucoup joué quant à la popularité de ces films.
Et puis il est d'autres films, atypiques, où on peut, à l'extrême, n'y entendre AUCUNE musique.
En effet, ce "choix" faisait fait partie des conditions posées par le responsable du monastère de la Grande Chartreuse pour l'autoriser à tourner son film .
Pas de musique donc, pas d'éclairage additionnel non plus et pourtant, quel film inoubliable, même pour une agnostique.
Il peut paraître long. Mais comment donner à sentir, sans mots, ou si peu (il y a juste au premier tiers, quelques scènes consacrées au dimanche après-midi où, pendant deux heures, ils peuvent parler entre eux et, à la fin du film, le monologue, plus qu'un dialogue, d'un vieux moine aveugle et quasiment sourd) la lenteur des jours qui s'écoulent et se ressemblent tant, la succession des saisons, tout en faisant comprendre l'essentiel. Ces hommes, dont certains sont jeunes et parfois même très beaux, aiment cette vie où ils se consacrent à Dieu et n'ont plus besoin de parler pour communiquer entre eux et avec Dieu.
Il y a des images superbes.
Les grains de poussière qui volent dans l'air, l'eau qui goutte doucement de l'assiette qui vient d'être lavée, celle du bénitier qui tremble un peu durant l'office, la neige qui fond, la pluie qui tombe en créant un tableau abstrait changeant, le moine qui sert les repas ou celui qui est au jardin qui s'arrêtent pour prier/méditer lorsque la cloche sonne, la main ridée du vieux moine qui lisse avec tendresse la bure dans laquelle il va couper une robe pour le nouvel arrivant...
Officiellement ce film est catalogué comme un documentaire.
En fait c'est un OFNI (Objet Filmé Non Identifié). Plus sérieusement, c'est un film qui incite à la méditation ou plus exactement c'est une méditation filmée à l'issue de laquelle je suis sortie convaincue de l'importance, pour ne pas écrire de la nécessité de faire des pauses dans sa vie, de savoir s'arrêter, de jouir au moment présent de la beauté du monde qui nous entoure, d'être en harmonie avec celui-ci.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
2 commentaires:
"Le grand silence" une belle leçon d'humilité que j'ai toujours bonheur à regarder...
Belle fin de journée chère anna
leçon d'humilité écrivez-vous Maria?
Tout bien réfléchu, oui, effectivement.
Mais ce n'est pas ainsi que je l'ai perçu au prime abord: je l'ai en effet avant tout ressenti comme une longue invitation à la méditation, préalable à la sérénité... laquelle n'excluait cependant pas une certaine sensualité alors même que cet univers est très austère.
Enregistrer un commentaire