Qui n'a rêvé un jour de changer de vie pour une autre fort éloignée que celle qu'il a croit-il librement choisie.
Certains le font la cinquantaine venue, même si ils vont rarement jusqu'à autant bouleverser leur vie comme le fit celui qui pour moi restera toujours cet adolescent ébouriffé au regard dur et lointain.
Comment ne pas être séduit par ce jeune homme de 17 ans qui, un peu plus de 3 ans plus tard, tournerait le dos à tout ce qu'on attendait qu'il soit, un poète devenant enfin acceptable puis accepté dans une société encore puritaine.
N'est ce pas d'ailleurs cette même société qui, plus un siècle plus tard, taira soigneusement aux lycéens dont je faisais partie ses amours tumultueuses avec Verlaine, lequeul préférera s'en retourner sagement dans son rassurant cercle familial plutôt que suivre "le poète aux semelles de vent" dans ses errances européennes puis africaines qui le mèneront jusqu'à ce qui était alors considéré comme faisant partie de l'un des bouts du monde, la corne de l'Afrique.
Et de ce qui fût la seconde partie de sa vie, comment ne pas être tenté d'oublier les rares photos de sa vie d'après, d'occulter ce que dut être cette vie africaine pour ne garder gardant en mémoire que le souvenir que du poète, celui de "une saison en enfer" ou encore des "illuminations" . Tel est d'ailleurs mon cas, moi qui n'ai pendant longtemps eu parmi mes poèmes préférés que "voyelles" et plus encore "le dormeur du val" l'un, voire le premier, poème antimilitariste.
Mais un jour, un internaute, celui-là même qui m'avait opter pour un voyage le long de la Loire, m'a rappelé un autre poème de Arthur Rimbaud.
Je me suis alors aperçue qu'un auteur avait fait figurer ce texte sur la page de garde d'un très beau livre pour enfants... un de ces contes qui parlent peut être encore plus aux adultes qui le lisent qu'aux enfants qui l'écoutent.
Le voyage d'Orégon, c'est l'histoire d'un clown qui décide de ramener un ours "Orégon" dans son Orégon natal.
Le voyage, long, sera aussi l'occasion pour le clown de s'assumer tel qu'il est ainsi que l'y invite un routier croisé en chemin:
"Pourquoi gardes-tu ce nez rouge et ce masque blanc?" m'a demandé Spike "Tu n'es plus sur la piste d'un cirque"
"ils me collent à la peau. Ce n'est pas facile d'être un nain..."
"Et d'être noir dans le plus grand pays du monde?"
Nous étions de la même famille...Je n'avais rien à ajouter..." Après cette rencontre, l'homme et l'ours continueront leur chemin: " On cheminait sous la grêle. On festoyait dans les maïs. on somnolait dans l'herbe tiède. On rêvait sous les étoiles. Les oiseaux pour réveille-matin, les rivières pour salles de bains, le monde entier nous appartenait..."
Autant de phrases qui renvoient au poème écrit par Arthtur Rimbaud alors qu'il n'avait que 16 ans
Sensation
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue:
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien:
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.
Au bout du voyage, Orégon retrouvera sa liberté. Et après une dernière nuit passée avec lui le clown déclarera:
"Dans le matin blanc, je partirai le coeur léger et la tête libre."
Et il s'en ira, en laissant derrière lui son nez rouge de clown dans les neiges de l'Orégon.
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5 commentaires:
J'adore une saison en enfer. Mais n'oublions pas qu'il a fini sa vie en trafiquant d'armes en Afrique ...
Ange ou démon....
L'homme aux semelles de vent.......
Il échappe à la statue et pourtant.........
Celui qui croyait à ts les enchantements écrivait des silences assourdissants et toujours ce retour vers sa mère ???
éternel adolescent en fait
Belle histoire D'Orégon un conte plutôt
Merci pour mon message envolé AA
Quelle belle invitation à lire. Je vais de suite chercher à me procurer ce livre (pour Rimbaud c'est déjà fait… rires)
Belle et bonne journée.
PS : pour la photographie, elle date de quelque temps, elle me paraissait illustrer mon propos. Pour la réaliser je n'ai eu qu'à lever les yeux et… un peu de chance d'être où il le fallait…
Deux vies, seulement?
Votre question m'a d'abord intriguée: "Deux vies, seulement?"
Et puis j'ai lu votre commentaire sur Zola.
Alors oui, en ce sens vous avez raisons, chaque oeuvre qui est créée c'est une nouvelle vie qui commence: une re-naissance
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