Plus que l'évolution du graphisme de Bilal qui au fil du temps devient moins hachuré (comme le faisait Gir(aud) quand il dessinait Blueberry) ou de sa palette chromatique qui passe de la dominante verts/marron au gris/bleuté, ce sont les histoires inventées par Pierre Christin qui sont intéressantes à raconter car elles indiquent comment, dans cette société post-soixante-huitarde, les choses ont pu évoluer par rapport à un certain nombre de valeurs.
Dans "la croisière des oubliés" profitant d'une expérience en cours dans une base militaire implantée dans les Landes, grâce à un mystérieux étranger, tout un village s'envole pour échapper aux militaires qui grignotent petit à petit ses terres et projets d'aménagement des sols (extension de l'usine polluante, de la marina...).
"... fable anarco-écolo, où on se prend à rêver à un monde impossible..." Voilà comment la qualifie un internaute. Et il ajoute: les "petits gagnent le droit de rester sur leurs terres dans des conditions décentes quand les puissants militaires et politiques inclus s'en sortent avec des séquelles qui les feraient sans problème figurer dans quelque film de science-fiction".
Le point de départ est quasiment le même dans "le vaisseau de pierre". L'internaute précité parle ainsi de cette aventure: "... Quand les morts aident les vivants, aucune bataille n'est jamais perdue d'avance. Les combattants du vaisseau de parviendront-ils à déjouer le complot des requins, promoteurs et politiciens véreux qui veulent défigurer leur Terre ? De l'écologie fantastique et poétique..."
Sauf que là pour contrer les projets immobiliers et autres d'un groupe, le petit village breton n'aura d'autre solution que de s'exiler grâce, toujours à ce même étranger mystérieux et à l'Ankou venu du fond des âges, dans la lointaine terre de feu. La désillusion pointerait-elle?
Le doute devient encore plus fort avec la 3ème aventure: "la ville qui n'existait pas" où intervient ce mystérieux étranger qui a convaincu l'héritière en fauteuil roulant qui s'était retirée du monde d'utiliser autrement les fonds dont elle hérite de son père qui était à la tête d'un empire industriel.
L'internaute commentateur parle ainsi de cette aventure: "Une ville de rêve, où les enfants sont rois, les femmes libres, les hommes égaux, heureux et sans souci. Où l'on vérifie une nouvelle fois que l'utopie comme l'enfer ont ceci de commun qu'ils sont tous deux pavés d'excellentes intentions." Car la fin est amère puisque, observés de son donjon par l'héritière, les habitants de cette ville idéale (???) sont confinés dans celle-ci tandis qu'elle est désormais "protégée" par des vigiles.
Moins de 10 ans après mai 68, le temps de rêves était-il déjà révolu?
Ce sentiment sera encore plus fort avec l'ouvrage suivant du duo.
2 commentaires:
Que de lectures à venir (éclats de rires)
Au moins, je sais un peu mieux ce qu'il me reste à faire (rires) Merci.
Réponse tardive Michel, comme à beaucoup de commentaires de ces derniers jours.
Oui ces 3 BD sont à connaître, à la fois sur le fond (les scénarii de P. Christin) et la forme: voir les évolutions de Bilal qui a maintenant trouvé son coup de patte tant sur la forme que sur la palette graphique... tout comme "les phalanges de l'ordre noir" et "partie de chasse" qui ont suivi. Mais aussi via les oeuvres où il a oeuvré seul. Je pense notamment à "la foire aux immortels" ou au tout dernier "animal'z" que l'on m'a offert et où derrière une apparente nudité se cache une foison de réflexions possibles.
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